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Ron Hochuli, Berne Jeudi 28 juin 2007 | ||
Deux nouvelles chaînes de radio, un nouveau support, avant que tous les auditeurs ne soient amenés à changer de poste, dans les années à venir. Le média radio entame sa révolution, avec la décision prise mercredi par le Conseil fédéral. Trois conséquences majeures. D'abord, l'offre sera étendue. Ensuite, d'un point de vue technologique, la radio traditionnelle est appelée à disparaître, au profit d'un véritable instrument multimédia. Enfin, la SSR voit son monopole renforcé, estiment certains élus, ce qui ne manquera pas d'ouvrir un nouveau débat politique autour de sa mission de service public. A très court terme, le changement s'annonce relativement mineur pour l'auditeur: tout juste bénéficiera-t-il d'une offre légèrement élargie. Le Conseil fédéral a en effet autorisé la SSR à diffuser, dès le 1er novembre, World Radio Switzerland (WRS), héritière de l'actuelle World Radio Geneva. Il s'agira d'une chaîne nationale d'information et de divertissement en anglais, qui nourrira des collaborations avec la BBC pour l'actualité étrangère. Ce programme s'adressera aux résidents anglophones, aux touristes, au personnel diplomatique «et aux nombreux Suisses qui ont des affinités avec l'anglais», explique Gérard Tschopp, directeur de la Radio suisse romande (lire interview). C'est également le 1er novembre que DRS News, radio alémanique d'information en continu, diffusera ses premières émissions. Ces deux nouvelles chaînes, pour lesquelles la SSR investira 10 millions de francs par an, pourront être captées en FM, puis, dès l'an prochain, sur un nouveau support numérique, le DAB (digital audio broadcasting). Par ce canal, elles ne seront accessibles qu'aux auditeurs disposant d'un récepteur DAB, soit moins de 10000 personnes actuellement en Suisse romande. En effet, aujourd'hui, seul l'Arc lémanique est couvert par le DAB. Et il faudra attendre la fin 2008 pour que l'ensemble du territoire romand soit équipé. Concrètement, cette technologie permet non seulement de recevoir un nombre quasi illimité de chaînes (l'enjeu des fréquences hertziennes disparaît). Elle offre également une meilleure qualité de son et la possibilité de mettre un programme sur «pause» puis de le reprendre. A terme, il sera en outre possible de diffuser à la fois du son et de l'image (lire ci-dessous). Si une telle perspective n'est pas réaliste dans un avenir très proche, le traditionnel poste radio pourvu d'une antenne, lui, est bel et bien appelé à disparaître. Et, d'après les plus optimistes, du côté de la SSR, le recyclage du vieux matériel serait à prévoir à un horizon de trois ans. D'ici là, l'offre en matière radiophonique va s'étoffer davantage encore. Outre les deux nouveaux programmes déjà évoqués, la Radio suisse romande planche actuellement sur deux autres projets: une chaîne d'information en continu francophone devrait voir le jour pendant la période de l'Euro 2008. Un autre canal sera destiné aux enfants. Enfin, dès la semaine prochaine, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) devrait attribuer une concession à huit nouvelles stations privées, choisies parmi 18 candidatures. Parmi les parlementaires fédéraux, l'avenir du paysage radiophonique ne manque pas d'alimenter les débats. En effet, avec le DAB, c'est un nouveau questionnement autour du service public qui s'amorce. «La question n'est désormais plus de savoir combien de canaux on doit attribuer au service public, puisque les fréquences seront quasi illimitées. Il faut dorénavant évaluer les contenus», résume Christian Levrat. Et, aux yeux du socialiste fribourgeois, il est «inadmissible que la SSR se lance dans des produits de niche que peuvent exploiter des privés». Si une chaîne anglaise peut «à la rigueur se justifier», il n'en irait pas de même concernant un programme pour les enfants. Ce d'autant moins qu'à terme, le DAB servira à la fois à la diffusion de sons et d'images. «Or, de nombreuses chaînes de télévision s'adressent déjà à un public jeune», constate le Fribourgeois. Il affiche également un malaise face à la stratégie d'ensemble de la SSR vis-à-vis du monde politique: «Il y a quelques mois, la SSR exigeait une hausse de la redevance qui a finalement été refusée. Cela ne l'empêche pas, aujourd'hui, d'annoncer des investissements à hauteur de 10 millions de francs pour deux nouvelles chaînes...» Pour le Fribourgeois, une chose est sûre: il faudra surveiller encore plus étroitement l'évolution de l'offre des chaînes de la SSR et la conformité de cette offre au mandat de service public. Le son de cloche est similaire chez Georges Theiler. Pour le radical lucernois, une chaîne anglaise publique est «une absurdité». Ce d'autant plus à l'heure où la question de l'intégration des étrangers d'une part et l'éventuelle priorité donnée à l'apprentissage des langues nationales d'autre part figurent à l'agenda politique. Plus généralement, dénonce Georges Theiler, «c'est comme si l'on avait libéralisé le marché de l'audiovisuel à la concurrence il y a dix ans, pour mieux tuer les indépendants aujourd'hui». Aux yeux du Lucernois, la multiplication des chaînes publiques constitue de facto un frein pour les privés: «Nous sommes face à un monopole d'Etat toujours plus écrasant!» Pour d'autres élus enfin, «autant accorder une marge de manœuvre conséquente à un service public qui livre des contenus de qualité». Un avis que la SSR a trois ans pour conforter, si elle aspire à se voir octroyer une hausse de la redevance à la prochaine occasion, soit en 2011... année électorale |
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Marion Moussadek Jeudi 28 juin 2007 | ||
• Les nouveaux programmes Deux nouvelles stations de radio s'ajoutent au bouquet DAB exploité jusqu'à présent par la SSR: DRS News, programme d'information continue en Suisse alémanique, et WRS (World Radio Switzerland, anciennement WRG) qui baignera toute la Suisse romande et le Tessin dès novembre. Sans compter les stations privées qui se bousculent au portillon pour profiter du nouveau vecteur: huit outre-Sarine, et sans doute autant côté romand, qui ne devraient pas être opérationnelles avant fin 2008. • La fréquence L'auditeur pourra rester branché sur une même radio de Genève à Brigue sans avoir à rechercher sa nouvelle fréquence, puisque le signal est «porté» par une seule et même plateforme numérique. Sauf que les bouquets fonctionnent par régions linguistiques. • La qualité de la réception Contrairement aux ondes courtes, le DAB ne supporte pas de «parasites». Pour peu que de la «friture» s'immisce dans la diffusion, le récepteur s'éteint purement et simplement. Ces inconvénients ne devraient intervenir qu'au creux d'une vallée alpine reculée, ou au 3e étage d'un sous-sol. • Des images et du texte Pour peu que l'auditeur soit équipé d'un récepteur avec écran, la transmission numérique permet de recevoir ce qu'on appelle dans le jargon «des données associées»: du texte (le titre de la chanson en cours, par exemple) et des images fixes (la pochette de l'album). Pas de clip donc, pour l'instant. • Combien ça coûte? Pas de répercussion du coût de la mise en place du réseau sur le consommateur qui devra néanmoins acquérir un récepteur approprié. Plus de 900 types d'appareils existent actuellement, mais les plus sophistiqués ne sont pas encore en vente en Suisse. On trouve néanmoins des baladeurs, des autoradios, des radios-réveils tous équipés de la réception DAB. Exemple de fonctions supplémentaires selon le type d'appareil choisi: touche pause, programmation et enregistrement. A noter que la plupart cumulent les deux types de réception, à l'instar d'un lecteur DVD également doté de l'ancien VHS. Dès 100 francs. • Combien de temps pour m'adapter? Le système analogique (ondes courtes FM) et le DAB devraient cohabiter encore dix ans. Le transistor est donc encore d'actualité, pour autant qu'on n'ait envie de goûter ni aux nouveaux programmes, ni à la qualité du son. • Quelle est la couverture? Actuellement, la réception DAB qui diffuse les seules radios publiques touche 85% de la population. Au 3e trimestre 2008, elle devrait inonder la Suisse entière. • Quel est l'avenir du DAB? Deux générations supérieures au DAB existent déjà. Le DAB+ permet d'agglomérer plus de programmes sur le même bouquet et sera probablement déjà celui de 2008. Le T-DMB, retenu par la France en avril dernier, véhicule également de la vidéo animée. Seul bémol: l'architecture du système est connue, mais les récepteurs ne sont pas encore disponibles. |
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Ron Hochuli Jeudi 28 juin 2007 | ||
Le Temps: Il y a quelques mois, la SSR demandait une hausse de la redevance radiotélévision. Bien que celle-ci ait été refusée, vous annoncez la création de nouvelles chaînes. Vous n'êtes pas au bord de l'étouffement, comme vous le prétendiez? Gérard Tschopp: Il faut garder à l'esprit que la demande de hausse de la redevance ne concernait que deux investissements: une évolution de l'infrastructure technique pour l'extension du DAB. Et, précisément, le développement de World Radio Switzerland (WRS). Le premier projet a été repoussé. Et pour le second, j'ai reçu le soutien de tous mes partenaires. Les Alémaniques de la DRS, les radios tessinoise et romanche de même que Swissinfo ont accepté de racler les fonds de tiroir afin de concrétiser ce projet original. La diminution des budgets, dans les médias, n'empêche pas la créativité. Nous essayons de faire des économies dans les structures et non dans les contenus. - Le service public se définira précisément, à l'avenir, en termes de contenu. Or, il existe déjà une offre médiatique pour les enfants, et on peut également se demander si une chaîne anglaise a sa place dans le mandat de la SSR... - Mais où est la chaîne anglaise qui livre des informations suisses? Il y a une demande à la fois d'un public suisse qui a des affinités avec l'anglais et d'un public d'expatriés qui n'a pas, soyons francs, besoin de s'intégrer en Suisse. Mais qui, malgré tout, aspire à connaître notre pays. En outre, cette chaîne améliorera l'image de marque de la Suisse, notamment en termes d'ouverture. Quant aux enfants, ils ont certes Cartoon Network à la TV. Mais nous visons un contenu intelligent, différent d'une approche commerciale. Et même si le privé décidait d'investir ce créneau: le service public doit-il s'arrêter à ce que le privé ne fait pas? Le cas échéant, nous n'aurions qu'une chaîne d'opéra et de musique classique... - Avec le DAB, la SSR renforce son monopole, en prenant beaucoup d'avance sur les privés, qui ont moins de moyens... - Cette vision d'expansion monopolistique ne correspond pas à la réalité. Nous nous sommes lancés dans le DAB en 1999. Nous avons jeté de l'argent par les fenêtres pour un résultat médiocre. Précisément parce que nous étions seuls dans ce créneau, sans les privés. Et parce que nous n'avions pas de nouveaux programmes à lancer en parallèle. Le développement du DAB, avec l'arrivée de 18 à 20 nouveaux programmes à la fois publics et privés dans l'année à venir, va permettre à cette technologie de prendre un réel essor en Suisse. - Le DAB sera un produit multimédia, permettant aussi la diffusion d'images. A long terme, va-t-on vers une fusion entre radios et télévisions du service public? - La convergence va se développer, parce que le public la souhaite. Jusqu'où ira-t-elle? Peu importe. Ce qui compte, c'est la qualité des contenus. Des contenus attrayants doivent être confectionnés par des professionnels. Des spécialistes de l'écrit sur Internet, d'autres pour le support radiophonique et d'autres encore dans le télévisuel. Et puisqu'il y a des supports différents, des marques différentes devraient subsister. Néanmoins, tout est possible... |