Le monopole de Swisscom levé, à quand de nouvelles offres?
TELECOMS.
Le parlement a bouclé le dossier du dernier kilomètre. Les lignes à haut débit seront libéralisées, mais le chemin avant les premières nouvelles offres est encore très long.
Anouch Seydtaghia
Mercredi 22 mars 2006
Fi-ni! Les parlementaires en ont enfin terminé avec le dossier du fameux dernier kilomètre de Swisscom. Trois ans et demi après les premières discussions, les deux Chambres ont avalisé mardi la proposition de la conférence de conciliation. Une conférence qui a eu besoin de deux séances pour parvenir à ses fins, la seconde ayant débuté à six heures mardi à l'aube. Après six débats au National et au Conseil des Etats, le dossier va désormais passer entre les mains des opérateurs. Six questions-réponses pour comprendre ce qui va se passer.
Qu'a décidé le parlement?Le dernier kilomètre - ou «last mile» - reliant les 1400 centraux téléphoniques de Swisscom à tous les ménages du pays sera ouvert à la concurrence. Les opérateurs alternatifs auront accès librement à cette paire de fils de cuivre. Dans le cas particulier de la large bande, cet accès sera limité dans un premier temps à quatre ans - il s'agit d'un compromis entre les positions initiales des deux Chambres. Durant cette période dite de «bitstream access», les opérateurs alternatifs devront investir dans les centraux de Swisscom. Passé ces quatre ans, ceux qui n'auront pas suffisamment investi pour passer au système dit de «full access» ne pourront poursuivre leurs activités.
Que peuvent attendre les consommateurs?Une baisse du prix de l'accès à l'Internet à haut débit. Ensuite, une baisse du prix du raccordement téléphonique - les 25,25 francs actuels versés à Swisscom. D'autres opérateurs pourront percevoir une redevance moins chère et attribuer des numéros. Les prix des communications pourraient baisser via des forfaits. Des concurrents de Swisscom pourraient se lancer dans la TV via ADSL. Enfin, les entreprises verront le prix des lignes louées baisser.
Comment réagissent les opérateurs?«Nous prenons acte d'une décision purement politique», affirme sobrement Christian Neuhaus, porte-parole de Swisscom. Tele2 et Sunrise saluent cette décision, mais déplorent la limite à quatre ans du «bitstream access». Cablecom se réjouit - il pourrait proposer des offres sur le réseau de son grand concurrent, Swisscom. Pour Francis Cobbi, codirecteur de l'opérateur de VTX, l'ouverture du dernier kilomètre est fondamentale: «C'est une bonne nouvelle, mais combien Swisscom nous facturera ses services? C'est encore le flou total.»
A quand les premières offres?Sans doute pas avant... 2008! Porte-parole de l'Office fédéral de la communication (Ofcom), Caroline Sauser fait le compte: «Il faudra d'abord rédiger les ordonnances d'application, les soumettre au Conseil fédéral, pour que la loi entre en vigueur au premier trimestre 2007.» Ensuite, ce sera aux opérateurs alternatifs (Sunrise, Tele2, etc.) de négocier nouveaux prix et nouveaux services avec Swisscom. Si les discussions n'aboutissent à rien - Swisscom fera traîner les choses au maximum, c'est certain -, la Commission fédérale de la communication devra tranchera en sept mois maximum, en ayant recours aux services de l'Ofcom, mais aussi à la Commission de la concurrence. Ajoutons-y, enfin, la possibilité pour les deux parties de faire recours au Tribunal fédéral...
Les régions périphériques seront-elles pénalisées?«En quatre ans, nous n'aurons pas le temps d'équiper les 1400 centraux, et nous nous concentrerons d'abord sur les centres urbains», affirme Mathieu Janin, porte-parole de Sunrise. Christian Levrat, président du Syndicat de la communication et conseiller national (PS/FR), se veut optimiste: «Certes, les opérateurs alternatifs seront enclins à privilégier les villes, mais ils investiront aussi dans les régions périphériques. Et dans ces régions, Swisscom sera toujours motivé à investir fortement. Il n'y aura donc pas de trou sur la carte, comme en France où France Télécom ne propose pas de haut débit dans des régions entières.»
De bons résultats en France, mais...
Anouch Seydtaghia
L'exemple de la France vient souvent à l'esprit lorsque l'on parle d'ouverture du dernier kilomètre. Entré en vigueur mi-2001, le dégroupage a donné de bons résultats, mais qui sont discutés. D'un côté, des opérateurs tel Free proposent, pour 29,99 euros (47 francs), une connexion internet d'un débit de 20 Mbit/s, de la téléphonie gratuite vers 15 pays, et une centaine de chaînes de télévision.
Alléchant. Revers de la médaille, les opérateurs alternatifs sont si peu incités à investir que seuls 54% de la population française vivent actuellement dans une zone dégroupée. Début 2005, ce chiffre était de 52%, selon l'Autorité française de régulation des communications électroniques et des postes. Au total, le parc de lignes dégroupées est estimé à 2,82 millions. Un bon taux européen, certes, mais dont profitent surtout les villes.
http://www.letemps.ch/template/suisse.asp?page=5&article=177018
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