jeudi 17 juillet 2008

AGROGLYPHE - Avec un premier crop circle à Morrens, l’été vaudois s’annonce géométrique

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Avec un premier crop circle à Morrens, l’été vaudois s’annonce géométrique

AGROGLYPHE | 00h30 Un pilote d’avion a découvert hier un nouveau «cercle de culture» dans un champ de Morrens.

DESTRUCTION: Auguste Elie Borgeaud peine à comprendre ces gens qui détruisent «par plaisir». Interloqué, il parcourt son champ de blé dévasté, encore sous le coup de l’émotion. Selon lui, rien ne dit que la batteuse saura relever les épis aplatis.MORRENS, LE 16 JUILLET 2008

NICOLAS VERDAN TEXTES, CORINNE AEBERHARD PHOTOS | 17 Juillet 2008 | 00h30

Auguste Elie Borgeaud ne dit toujours rien. Voilà cinq minutes qu’il parcourt ce qui ressemblait, mardi encore, à son champ de blé. Une belle surface cultivée, sur la commune de Morrens, qui vient de subir une curieuse métamorphose, laissant son propriétaire sans voix. A intervalles réguliers, le blé est couché, à raz le sol, suivant des cercles concentriques. A hauteur d’homme, le triste spectacle d’une culture aplatie. Vu du ciel, le phénomène est tout autre. Il porte un nom: crop circle , agroglyphe en bon vaudois.

C’est précisément dans les airs que ce nouvel épisode de la série estivale des «cercles de culture» a été repéré. Survolant hier matin la région d’Echallens dans son petit avion, Grégoire Guhl aperçoit soudain un curieux motif géométrique dans un champ situé à la lisière de la forêt des hauts d’Assens. Un crop circle, pas de doute, dont le tracé évoque un symbole chimique, comme on en trouve dans les livres de science.

«Si au moins il était beau»

Le pilote amateur réalise quelques clichés, histoire d’immortaliser une œuvre par définition éphémère. Comme un mandala tibétain, les crop circle finissent par être effacés. Le plus souvent avant même que la nature ne s’en mêle. A Corcelles-près-Payerne, en juillet 2007, près de cinq mille curieux avaient eu le temps d’admirer un crop circle avant que la faux mette un terme à son exposition champêtre.

Retour sur terre, avec Auguste Elie Borgeaud, rejoint par son fils, Pierre-Louis. Informé par nos soins, l’agriculteur poursuit son examen en silence. Premier commentaire, sous le coup d’une émotion toute rentrée, à la vaudoise: «Ah ouais, ils ont fait des dégâts…»

«Ils?» Auguste Elie Borgeaud ne se perdra pas en conjectures. Il a déjà entendu parler des crop circle, il n’est pas surpris. Juste ennuyé que cela lui arrive à lui, dans son champ. «Si au moins ils avaient fait ça beau, comme à Dommartin», lâche son fils. Visiblement, la famille Borgeaud est au fait. Les crop circle n’ont pour eux, rien d’extraterrestre. «A force que les médias en parlent», explique Auguste Elie.

«Plaisir de détruire»

Dans le champ encore humide des dernières pluies, les Borgeaud ne sont pas seuls. Un représentant de produits agricoles est venu voir de plus près: «C’est du bricolage, il y a des ronds plus ou moins jolis.» Un avis esthétique renforcé par un constat plus technique: «Si tu n’avais pas traité le blé avec un produit rarcourcisseur, ils auraient moins de peine à coucher les épis.»

Un emplacement stratégique

Mesurant désormais l’étendue des dégâts, Auguste Elie Borgeaud montre les premiers signes de colère: «C’est bizarre, ce plaisir de détruire.» Difficile de chiffrer les pertes, assure l’agriculteur, qui estime la surface détruite à 3500 m2. «C’est mal fait, soupire Auguste Elie. Parce que du blé, aujourd’hui, on en a besoin.» Trop tôt pour dire s’il portera plainte.

Le choix de l’emplacement du crop circle, en contrebas de la route reliant Morrens à Echallens, pourrait ne rien devoir au hasard. Les automobilistes ou les cyclistes ont en effet une vue plongeante sur le champ. De quoi avoir un premier aperçu des figures géométriques. Soit l’un des objectifs toujours visés par les auteurs de crop circle. A leur souci d’anonymat correspond un désir d’être admirés dans leur œuvre.

Chez les Borgeaud, l’idée d’organiser des visites de leur champ n’a pas germé. Ils se passeraient bien d’une telle publicité, comme le laisse entendre le fils, Pierre-Louis. Pour ces derniers paysans de Morrens – il en reste trois et demi, selon les termes d’Auguste Elie – la campagne n’est pas un terrain de jeu. Quand viendront les moissons, il faudra jouer d’habileté avec la batteuse. Tout ça de travail en plus pour ne pas perdre le blé précieux.

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